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Autres usages et impacts de
l’homme

Ces mesures ont-elles réussi?
Dans quelle mesure l’état de santé général est-il affecté?

Quelques indices d’une diminution de la pollution par les hydrocarbures en mer du Nord

La mer du Nord a été désignée comme Zone spéciale en vertu de l’annexe I de MARPOL, les rejets d’hydrocarbures ou d’huiles usagées sont donc maintenant réglementés de manière plus rigoureuse. La surveillance aérienne, réalisée dans le cadre de l’Accord de Bonn, suggère néanmoins que les rejets illicites d’hydrocarbures ou d’huiles usagées s’effectuent encore Figure 9.3. Peu de données sont disponibles pour permettre de quantifier les déversements d’hydrocarbures dans la zone OSPAR depuis 2000, à la suite de rejets accidentels ou illicites. Pour 80% des déversements détectés grâce à la surveillance aérienne, il est impossible d’identifier le pollueur. Il n’est donc pas possible de déterminer le nombre de déversements causés par la navigation. La surveillance à l’appui de l’Objectif de qualité écologique (EcoQO) pour la mer du Nord d’OSPAR sur les guillemots mazoutés laisse entrevoir que la pollution par les hydrocarbures en mer est en baisse.

Figure 9.3 Déversements d’hydrocarbures détectés...

Encadré 9.2 Le taux en baisse des guillemots mazoutés indique une diminution de la pollution en mer du Nord

EcoQO pour la mer du Nord: La proportion moyenne de guillemots de Troïl mazoutés en hiver (de novembre à avril) devrait correspondre à 10% ou moins du total de ceux trouvés morts ou mourants dans chacune des quinze régions de la mer du Nord sur une période d’au moins cinq ans.

Le guillemot est un oiseau de mer plongeur pouvant descendre à de grandes profondeurs qui est commun et très répandu dans l’ensemble de la zone OSPAR. Il est très sensible à la pollution par les hydrocarbures. Une fois mazouté, le guillemot meurt rapidement car il est atteint d’hypothermie et ne peut pas trouver de nourriture et s’alimenter. Ces oiseaux morts s’échouent sur les plages et leur proportion peut être utilisée comme indicateur de la pollution par les hydrocarbures dans des zones spécifiques.

Dans certaines parties de la mer du Nord, plus de 90% de tous les guillemots échoués étaient mazoutés, il y a seulement quelques décennies. Depuis lors, les taux d’oiseaux mazoutés ont considérablement diminué dans la plupart des zones. Il semblerait que ce soit dû à une meilleure application des mesures, à une meilleure sensibilisation et à l’introduction d’installations de réception portuaires des huiles usagées. L’EcoQO est cependant atteint dans très peu de parties de la mer du Nord. Les taux actuels d’oiseaux mazoutés dans la mer du Nord varient considérablement, allant de plus de 50% dans la mer du Nord méridionale (Belgique, Pays-Bas et sud-est de l’Angleterre) à environ 4% dans les Orkney en mer du Nord septentrionale.

Les principaux apports d’hydrocarbures minéraux proviennent des rejets opérationnels des navires, de sources telluriques et, dans une moindre mesure, de l’industrie pétrolière offshore. Ceci explique en partie la proportion plus élevée d’oiseaux mazoutés à proximité des couloirs de navigation à trafic intense (mer du Nord méridionale, Manche). Les accidents en mer sont une source moins fréquente.

Les mesures de gestion doivent se focaliser sur une meilleure application des réglementations actuelles et sur la sensibilisation des transporteurs maritimes à la réduction des rejets huileux illicites car les rejets d’hydrocarbures et de mélanges huileux causant des marées noires sont interdits en mer du Nord.

Évaluation du système des EcoQO pour la mer du Nord

Les déversements accidentels peuvent causer de graves dégâts

Les accidents entraînant des déversements en provenance de navires transportant des hydrocarbures ou autres substances dangereuses ou toxiques peuvent avoir des effets graves sur les écosystèmes marins. Il peut s’agir d’effets à court terme ou à long terme, selon les conditions climatiques et environnementales au moment du déversement, et de la sensibilité de la zone. La marée noire causée par le Prestige démontre l’importance de l’application des normes de l’OMI par les navires, d’une réponse pertinente aux risques et de la gestion des couloirs de navigation dans les zones écologiquement sensibles afin de réduire les risques d’accidents et l’impact des déversements d’hydrocarbures.

Encadré 9.3 Les effets à long terme de la marée noire du Prestige ne sont pas encore connus

En 2002 le Prestige, pétrolier à simple coque âgé de 26 ans, commence à répandre du fioul lourd visqueux provenant de sa cargaison de 77 000 tonnes à la suite d’un incident à 50 km de la côte de la Galice au nord de l’Espagne. Le Prestige est remorqué en mer. Au cours de cette opération, il se brise en deux dans une tempête et coule à 200 km de la côte par 3600 m de fond sur la pente du mont sous-marin du banc de la Galice où son épave continue à perdre du fioul.

On estime que 64 000 tonnes de fioul se sont répandues et ont pollué les fonds marins et plus de 1000 km de côtes d’Espagne et de France. La zone immédiate affectée au large de la Galice est une zone d’importance écologique qui héberge des récifs de coraux d’eaux froides et des éponges d’eaux profondes. Cette zone est également importante pour la pêche dont dépend 60% de la population de la Galice.

Les premiers effets sur les oiseaux de mer ont été graves. Sur les 20 000 oiseaux mazoutés recueillis, 75% étaient morts et parmi ceux recueillis vivants, seuls quelques-uns se sont rétablis. Les populations ibériques restantes de guillemots comptaient parmi celles étant les plus affectées. Les estimations suggèrent que le nombre total d’oiseaux affectés est beaucoup plus élevé, jusqu’à des centaines de milliers, étant donné l’impact étendu et à long terme de cette marée noire sur la côte atlantique.

L’analyse des biomarqueurs dans le poisson révèle que des zones étendues du plateau ibérique septentrional ont été affectées par le fioul du Prestige et que les effets mesurables ont diminué entre 2002 et 2005 pour atteindre des niveaux indiquant une amélioration de la qualité de l’eau. On possède très peu d’informations sur les effets de la pollution par les hydrocarbures sur les fonds marins profonds et ses communautés biologiques, ainsi que sur le taux de récupération.

Depuis 1998, un certain nombre d’accidents se sont produits dans la zone OSPAR, entraînant la perte de cargaisons (par exemple, produits chimiques, bois, conteneurs) et la perte de navires. Dans la plupart des cas, les informations permettant d’évaluer l’impact environnemental de ces pertes sont limitées. Un meilleur contrôle de l’assujettissement des cargaisons pourrait minimiser leurs pertes.

La pollution atmosphérique par les navires est en hausse

Les émissions de dioxyde d’azote (NOX), de SOX et de matière particulaire provenant des gaz d’échappement des machines et des citernes peuvent être transportées sur de longues distances. La plupart des émissions dans les zones maritimes de l’UE proviennent de cargos de jauge brute supérieure à 500 tonneaux. Environ 45% de toutes les émissions proviennent de navires battant pavillon d’un État membre de l’UE et environ 20% des émissions ont lieu à moins de 12 milles marins de la côte. La contribution totale de NOX provenant du trafic maritime international en mer du Nord et en l’Atlantique s’élevait à 1850 kt en 2007. Ceci représente une augmentation de plus de 20% depuis 1998. Sans les normes rigoureuses de l’annexe VI révisée de MARPOL, adoptées en 2008, les émissions provenant de la navigation internationale auraient pu augmenter substantiellement. Selon les prédictions des modèles, les émissions de SOX, de NOX et de matière particulaire provenant de la navigation internationale dans toutes les mers de l’UE augmenteraient d’ici 2020 de 40% (3200 kt), 45% (4800 kt) et 55% (400 kt) par an, respectivement, par rapport à leurs niveaux de 2000 Figure 9.4. La mise en œuvre des normes plus rigoureuses de l’annexe VI révisée de MARPOL permettra de cibler la pollution atmosphérique et devra être considérée comme hautement prioritaire, étant donné l’augmentation prévue du trafic maritime. Des normes encore plus rigoureuses s’appliquent dans les zones de contrôle des émissions de NOX et SOX désignées. En sa qualité de SECA, la mer du Nord est actuellement avantagée par la réglementation plus rigoureuse sur le carburant des navires relativement au SOX mais celle-ci autorise tout de même des carburants dont la teneur en soufre représente 15 000 fois celle du carburant utilisé par les véhicules routiers. De plus, la réglementation portant sur le carburant en vertu de l’annexe VI de MARPOL ne traite que du soufre et non pas d’autres substances polluantes; c’est une lacune qui devrait être comblée. Malgré la quantité importante d’informations sur les apports atmosphériques, la perception de la contribution de la navigation aux impacts environnementaux est limitée.

Les navires dégagent également des gaz appauvrissant la couche d’ozone (provenant par exemple des incinérateurs et des systèmes de refroidissement) et des gaz à effet de serre provenant des gaz d’échappement des moteurs et contribuent ainsi aux émissions globales. Une étude récente de l’OMI estime que, globalement, la navigation a émis 1046 millions de tonnes de dioxyde de carbone (CO2) en 2007, ce qui correspond à 3,3% du total des émissions mondiales de CO2 en 2007. La plupart de ces émissions (870 millions de tonnes, soit 2,7% des émissions globales de CO2) ont été attribuées à la navigation internationale.

L’OMI travaille actuellement dans le sens de mesures de réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant de la navigation. L’UE cible également les émissions atmosphériques provenant de la navigation grâce à sa Stratégie thématique sur la pollution atmosphérique de 2005. Les pays OSPAR soutiennent ces initiatives.

Le rejet et l’élimination illicite de déchets se poursuivent

L’élimination illicite de déchets provenant de navires peut être aussi préjudiciable pour la vie marine que les hydrocarbures et les produits chimiques. Les matières plastiques présentent le plus grand danger. Les rejets d’ordures sont réglementés par l’annexe V de MARPOL. Elle interdit l’élimination de matières plastiques dans la mer et limite sévèrement les rejets d’autres déchets, dans les eaux côtières et les Zones spéciales, provenant des navires. Tandis que la navigation est reconnue comme une source importante de déchets marins, il est difficile d’en quantifier le montant exact car de nombreux objets peuvent être attribués à plus d’une source.

Les effets des rejets des eaux usées sur la qualité de l’eau et par rapport à l’eutrophisation sont jugés minimes dans la mesure où ils sont conformes à l’annexe IV de MARPOL. Au large, les eaux usées non traitées sont assimilées grâce à une action bactérienne naturelle, mais les rejets illicites d’eaux usées près de la côte peuvent poser un problème local.

Le manque de données ne permet pas de réaliser l’évaluation des installations de réception portuaires des déchets

Selon MARPOL, l’eau huileuse de ballast, de lavage des citernes et des cales polluées et les déchets huileux devraient être conservés à bord en attendant de pouvoir être livrés dans les installations de réception portuaires pour les déchets. Il est difficile de déterminer si ces installations permettent une amélioration car on dispose de peu de données sur les quantités et les types de déchets traités. Aucun système de notification n’était en place avant la date de mise en œuvre des mesures et la plupart des opérations de traitement des déchets dans les ports sont sous-traitées à des opérateurs privés qui ne communiquent que rarement des informations aux autorités portuaires.

La cessation des pertes de TBT est prévue

L’abandon progressif du tributylétain (TBT) a bien progressé Chapitre 5. À la suite de l’interdiction mondiale par l’OMI de l’utilisation du TBT dans les systèmes antisalissure, on prévoit la cessation des pertes de TBT par la coque des navires, accompagnée du déclin de ses effets sur des espèces marines. Cependant les pertes des produits de substitution du TBT (tels que le cuivre et l’Irgarol) pourraient augmenter. On estime que les navires de la Zone économique exclusive (ZEE) des Pays-Bas rejettent collectivement, chaque année, jusqu’à 30 tonnes de cuivre en mer du Nord, aussi bien lors de leur transit que lorsqu’ils sont ancrés Figure 9.5. Le développement d’alternatives non biocides au TBT et au cuivre a progressé. Il s’agit par exemple des peintures autopolissantes et des revêtements anti-adhésifs.

L’introduction d’espèces non indigènes par les eaux de ballast se poursuit

Plus de 160 espèces non indigènes ont été identifiées dans la zone OSPAR, ainsi qu’il est rapporté plus loin dans ce chapitre. Le déversement des eaux de ballast (et des sédiments qu’elles contiennent) et les salissures sur la coque des navires représentent certaines des principales sources de ces introductions involontaires. Le risque d’introduction de nouvelles espèces est lié à la quantité d’eau de ballast rejetée, à la fréquence des visites des navires et aux similarités qui existent entre le milieu de prélèvement des eaux de ballast et celui où elles sont déversées. La croissance du trafic maritime présente un risque plus élevé d’introduction de nouvelles espèces. La possibilité de survie des organismes lors du voyage est plus importante car les navires sont plus rapides et les déplacements plus courts.

Les espèces non indigènes peuvent affecter sérieusement la structure des écosystèmes. Par exemple, la méduse nord-américaine (Mnemiopsis leidyi), qui se nourrit de zooplancton et d’œufs de poisson, a été introduite par les eaux de ballast dans la mer Noire dans les années 1980 et a été associée à des modifications spectaculaires de la chaîne alimentaire pélagique et à l’effondrement de la pêche commerciale de l’anchois. Cette espèce a été enregistrée pour la première fois aux Pays-Bas, en Norvège et en Suède en 2006. Ses effets sur la structure trophique et les stocks halieutiques de la mer du Nord sont méconnus. Des hivers plus doux causés par le changement climatique risquent de favoriser son expansion. Il y a lieu que les pays OSPAR ratifient la mise en œuvre de la Convention de l’OMI sur la gestion des eaux de ballast et évaluent les risques d’introduction de nouvelles espèces.

Préoccupations grandissantes quant au bruit et aux collisions avec les navires

Les pressions sur les populations de mammifères marins résultant du bruit des navires et des collisions avec ces derniers causent des préoccupations sans cesse croissantes, en particulier le long des couloirs de migration dans les Régions I, IV et V. Le trafic maritime s’avère être la source dominante de bruit à basse fréquence dans beaucoup, si ce n’est la plupart, des zones côtières. On estime que le bruit ambiant a pratiquement doublé (augmentation de 3 dB) tous les dix ans depuis les années 1950 dans certaines zones marines. La navigation commerciale est la cause la plus probable de cette augmentation. Le développement de navires plus rapides et plus grands ainsi que le trafic maritime en hausse causent de plus en plus de préoccupations en ce qui concerne les risques associés à la collision avec les navires. Ces collisions se révèlent fatales dans le cas des baleines, en particulier lorsqu’il s’agit de gros spécimens, et peuvent présenter une menace pour les populations vulnérables dans les eaux à navigation intense.

Les pressions sur l’environnement vont probablement augmenter

Il est difficile de faire des prédictions sur la navigation jusqu’en 2020, du fait de facteurs économiques confondants tels que le prix du pétrole et les questions géopolitiques. Cependant le trafic de transit des pétroliers devrait augmenter, ce qui présente des risques plus élevés pour l’environnement dans les couloirs de navigation les plus fréquentés, en particulier dans la Région II. La navigation devrait augmenter dans la Région I où le retrait de la banquise et les nouvelles technologies offrent de nouvelles possibilités d’exploitation des ressources arctiques (hydrocarbures, minéraux, pêche). Les déversements d’hydrocarbures provenant de la navigation arctique représentent les menaces les plus significatives.

Le trafic maritime et la taille des navires étant en hausse, on peut s’attendre à des pressions croissantes exercées par le dragage des couloirs de navigation et l’immersion correspondante de sédiments, la récupération des terres sur la mer et la construction d’installations portuaires. Ces pressions sont principalement concentrées dans les zones côtières où des pressions grandissantes risquent d’être en conflit avec les objectifs de conservation de la nature pour les zones présentant une valeur écologique particulière.

Figure 9.4 Pourcentage de retombées atmosphériques de soufre provenant...

Figure 9.5 Pertes estimées de TBT et de cuivre provenant...