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Protection et conservation de la
biodiversité et des écosystèmes

De quels problèmes s’agit-il?

Des pressions existent encore et sont même en hausse

Les pressions telles que le prélèvement d’espèces (par la pêche par exemple), la perte et la détérioration des habitats, l’introduction d’espèces non indigènes Chapitre 9, les obstacles à la migration des espèces et la qualité médiocre de l’eau sont encore présentes. Certaines pressions sont même en hausse dans certaines parties de la zone OSPAR et elles peuvent toutes agir synergiquement ou être exacerbées par le changement climatique. Ces pressions entraînent la perte de la biodiversité, notamment un déclin de l’abondance et de la diversité des espèces et habitats. Certains processus écologiques, tels que le frai, la migration et la signalisation biologique risquent également d’être interrompus.

Déclin grave de certaines espèces et de certains habitats

Les caractéristiques les plus sensibles sont celles qui sont facilement endommagées et dont le rétablissement est lent. Certaines ne s’en remettent jamais. Les récifs de coraux d’eau froide Lophelia pertusa poussent lentement, sont délicats et peuvent être endommagés par la pêche au chalut de fond. Le pocheteau gris est une espèce longévive qui se reproduit lentement et qui est particulièrement vulnérable à la pêche au chalut de fond. La patelle des Açores, l’esturgeon d’Europe et la baleine franche noire sont des espèces en voie de disparition dans l’ensemble de leur aire de distribution. Le nombre de baleines bleues dans la zone OSPAR est encore très faible et la population se reconstitue très lentement bien que protégée depuis plus de quarante ans contre la chasse commerciale.

La conservation de la biodiversité n’attire pas assez l’attention

Traditionnellement, la gestion des activités humaines dans le milieu marin ne se préoccupe pas assez de la conservation de la biodiversité. Ceci s’explique d’une part par le fait que les preuves précises des impacts sur les espèces, les habitats et les processus écologiques ne sont apparues qu’au cours des dernières décennies et sont encore rares dans certains cas, en particulier dans les eaux plus profondes. D’autre part, la durabilité à long terme n’a pas toujours été au centre de la gestion. Enfin, l’importance de la biodiversité pour le fonctionnement propre des habitats fait encore l’objet de débats. OSPAR, en coopération avec d’autres organes internationaux, s’efforce d’y remédier mais les plans de gestion nationaux n’accordent encore pas assez d’attention aux impacts sur les espèces et habitats. Les connaissances et pratiques scientifiques relatives à l’évaluation de l’état de la biodiversité sont encore en évolution et il convient d’appliquer une approche adaptive de la planification de la gestion, en tenant compte des meilleures preuves scientifiques dès qu’elles sont disponibles.

Les pressions exercées sur les côtes sont différentes de celles exercées au large

Les eaux côtières comportent des zones d’alimentation, de frai et de reproduction qui se trouvent dans les itinéraires de migration des oiseaux de mer et de certaines espèces de poisson. Ces zones accueillent également des activités humaines intenses et variées qui exercent un large éventail de pressions, et peuvent entraîner une détérioration ou la perte d’habitats clés dans les estuaires et les zones intertidales. La montée relative du niveau de la mer et les développements côtiers exercent des pressions sur les marais salants et les herbiers, qui sont très productifs et constituent des puits naturels de carbone. Des zones clés des mers épicontinentales, notamment les bancs et récifs du large, et les zones frontales situées entre les masses d’eaux différentes, jouent un rôle important dans la productivité pélagique. La pêche est reconnue comme une pression clé sur les espèces et habitats des mers épicontinentales. Des informations supplémentaires sur les zones présentant une importance écologique sont nécessaires pour pouvoir améliorer la gestion.

Les zones de plus de 200 m de profondeur représentent environ 83% de la zone OSPAR. La protection de la biodiversité marine contre les activités humaines, telles que la pêche ou le futur développement de l’exploitation minière des fonds marins et de la bioprospection dans ces vastes zones de grands fonds, présente un défi particulier. On ne cesse de découvrir l’ampleur de certains habitats spécialisés des grands fonds, par exemple les champs de sources hydrothermales.

Encadré 10.1 Évents et suintements en eaux profondes

On trouve des évents hydrothermaux à proximité de sources thermales ou des jets d’eau surchauffée sous-marins. L’eau riche en minéraux fait vivre des communautés biologiques qui puisent leur énergie dans les substances chimiques dissoutes, telles que le sulfure d’hydrogène (H2S), plutôt que du rayonnement solaire. La photo ci-dessous (en haut) montre une forme typique d’évent hydrothermal, un « fumeur noir ». Le panache se compose d’eau chaude s’échappant des fonds marins qui contient des sulfures de métaux (noirs). Des bactéries chimiotrophes métabolisent le H2S et font vivre une communauté unique d’animaux qui s’en nourrissent ou avec lesquelles ils ont des interactions à long terme. La photo ci-dessous (en bas) montre une communauté spéciale de crevettes hydrothermales. Les évents hydrothermaux de la zone OSPAR (voir la carte) occupent de petites zones des fonds marins à des profondeurs se situant entre 850 et 4000 m, liées à la dorsale médio-atlantique dans les Régions I et V. Les évents hydrothermaux ont une vie relativement courte, généralement quelques décennies. Ainsi le nombre exact et leurs emplacements ne sont pas connus.

Les suintements froids apparaissent lorsque du méthane et du H2S se dégagent des fonds marins à des températures proches des températures ambiantes et ils fournissent de l’énergie à la chaîne alimentaire à base de bactéries. Ils se trouvent fréquemment dans les eaux européennes et peuvent constituer diverses caractéristiques à plus ou moins grande échelle sur les fonds marins. Le volcan de boue Håkon Mosby est l’une des caractéristiques de ce type les plus grandes de la zone OSPAR, d’un diamètre de 1 km. Les communautés vivant sur des suintements froids différents se composent fréquemment d’espèces différentes, ce qui indique une forte variabilité dans les processus écosystémiques et de la biodiversité à différentes échelles spatiales.

Les activités telles que l’extraction minière, la bioprospection et, à l’avenir, le tourisme pourraient présenter des risques, notamment pour la structure physique des évents hydrothermaux. La recherche scientifique peut également causer une détérioration physique. La désignation de zones protégées est l’une des approches à poursuivre dans le cadre de la gestion des impacts anthropiques sur les évents hydrothermaux. OSPAR a convenu d’un code de bonne conduite pour une recherche marine responsable en eaux profondes et en haute mer de la zone OSPAR.

Document de fond sur les dorsales océaniques comportant des sources hydrothermales

La biodiversité marine est encore mal connue et mal comprise

Les connaissances sur la biodiversité des zones côtières peu profondes se sont beaucoup améliorées au cours des dernières décennies, mais d’importantes lacunes subsistent concernant les organismes et les communautés vivant dans des zones de plus de 200 m de profondeur. Il est probable que les bactéries et les virus jouent un rôle crucial de force motrice dans les chaînes alimentaires et les cycles biogéochimiques mais ce phénomène n’est pas suffisamment bien compris. La compréhension de leur réaction aux changements environnementaux causés par les activités humaines, notamment le changement climatique, comporte des lacunes. La perception des habitats des eaux profondes et de leurs fonctions pour les espèces et les communautés benthiques comporte également des lacunes importantes. Des initiatives majeures de recherche exploratoire continuent à être nécessaires afin d’aborder les diverses lacunes et de soutenir les efforts de protection et de conservation des écosystèmes et de la biodiversité.