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Exploitation des ressources
marines vivantes

Ces mesures ont-elles réussi?

La réduction des flottes de pêche est compensée par leur efficacité croissante

La capacité de la flotte de pêche a été réduite dans la zone OSPAR. Les systèmes de quota appliqués dans la Région I ont permis de réduire la taille de la flotte et l’effort de pêche. Le nombre de chaluts démersaux islandais et l’effort de chalutage ont presque diminué de moitié depuis 1990, la puissance des moteurs a diminué de 25% de même que le tonnage brut. Au cours de la même période, le nombre de navires de pêche en Norvège a diminué de 43%, et le tonnage et la puissance des bateaux de la flotte de pêche ont diminué de 10%. Les efforts de réduction de la capacité de la flotte dans les eaux de l’UE ont permis de parvenir à une diminution générale de 26,7% du nombre de navires entre 1995 et 2009. Le tonnage et la puissance des bateaux ont baissé corrélativement. La réduction du nombre de navires, de leur taille et de la puissance motrice tend cependant à être compensée par les avancées technologiques permettant d’améliorer l’efficacité de la pêche.

L’effort de pêche est en baisse dans certaines zones mais en hausse dans d’autres

Dans la Région I, la fermeture à la pêche de grandes zones des eaux norvégiennes a contribué à réduire l’effort de pêche. Dans les îles Féroé, le nombre de jours de pêche attribués a été réduit de 33% depuis 1996.

Dans l’ensemble, l’effort de pêche dans la Région II a baissé d’environ 25% entre 2000 et 2006. En mer du Nord, l’effort de pêche au chalut à perche et au chalut à panneaux a baissé de 31% et 44% respectivement entre 1997 et 2004, bien que l’effort de chalutage des langoustines ait augmenté de 65%. Le chalut à perche a été remplacé de plus en plus par des chaluts jumeaux et la senne écossaise, qui utilisent moins de carburant. Dans la Manche occidentale, l’effort de pêche a augmenté entre 2000 et 2007, motivé essentiellement par l’utilisation d’engins qui ne sont pas concernés par les limites de l’effort de pêche, et l’effort de chalutage y est élevé.

Dans la Région III, l’effort de chalutage a baissé en mer d’Irlande et à l’ouest de l’Écosse, mais dans l’ensemble l’effort de pêche est resté élevé. Certains chaluts à perche ont été remplacés par des chaluts à panneaux ou des dragues à pétoncles, espèces non soumises à quotas.

Dans la Région IV, le nombre de navires de pêche français dans le golfe de Gascogne a baissé entre 2000 et 2006, à l’exception des ligneurs et des chaluts à filets maillants. Cependant, l’effort de pêche de chaque secteur a augmenté ou est resté stable, à l’exception de la pêche à l’anchois qui a été fermée de 2005 à 2009. Cette stabilité contraste avec la baisse observée de la mortalité pour la plupart des stocks halieutiques du golfe de Gascogne. Ceci pourrait s’expliquer par le fait qu’un plus grand nombre de stocks non évalués sont ciblés ou par une diminution de l’efficacité globale de la pêche suite à l’utilisation d’engins plus sélectifs.

Les premières mesures de gestion des efforts de pêche en eaux profondes ont été introduites en 2004, y compris un système de permis de pêche et de TAC. Des réductions de l’effort sont en place depuis 2005. Une réduction de l’effort de pêche des espèces d’eaux profondes devrait permettre de parvenir, en 2009, à un niveau représentant 65% du plafond défini en 2003.

Les régimes de gestion des efforts de pêche de l’UE couvrent la majeure partie de la zone OSPAR. Une évaluation de l’efficacité de ces régimes est en cours.

Les débarquements ont baissé dans l’ensemble mais les tendances varient

Le total des débarquements de poissons démersaux, de poissons pélagiques et de mollusques et crustacés a baissé entre 1998 et 2008 Figure 8.3. Cependant, ce n’est qu’après 2002 que l’on relève une diminution progressive. Entre 1998 et 2002 les captures totales sont plus variables, une augmentation modérée étant relevée entre 1999 et 2002. C’est uniquement dans la Région V que les débarquements de poissons et de mollusques et crustacés furent plus élevés en 2008 qu’en 1998.

Ce déclin général des débarquements s’explique, entre autres, par la détermination de limites de captures plus restrictives. Il y a cependant des variations considérables entre les Régions. Dans la Région I, les débarquements d’espèces démersales sont restés relativement stables durant cette période alors que ceux de poissons pélagiques et de mollusques et crustacés ont décliné. Dans la Région II, les débarquements d’espèces démersales ont continué à augmenter jusqu’en 2005, mais ont ensuite diminué, les captures étant plus faibles en 2008 qu’en 1998. Les captures d’espèces pélagiques ont diminué durant cette décennie. Les débarquements d’espèces pélagiques ont atteint leur minimum en 2002 dans la Région III. Depuis, on a relevé une légère augmentation mais les débarquements de poissons pélagiques en 2008 restent inférieurs à ceux de 1998. Les débarquements d’espèces démersales sont restés relativement constants dans la Région III. Les débarquements dans la Région IV ont peut changé. La plus grande augmentation des débarquements a eu lieu dans la Région V, où le débarquement de poissons pélagiques est passé d’environ 0,2 million de tonnes en 1998 à plus de 0,6 million de tonnes en 2005. Cependant depuis 2005 ils ont baissé pour atteindre environ 0,39 million de tonnes. Ces tendances s’expliquent principalement par le développement de la pêche au merlan bleu pour laquelle un TAC a été instauré en 2005.

Le contrôle des rejets se resserre

Il est prématuré d’évaluer les effets d’une action récente portant sur les rejets dans les eaux de l’UE. Jusqu’à une période très récente, les quantités de rejets étaient encore élevées dans un certain nombre de pêcheries de l’UE. On a par exemple enregistré des rejets importants dans de nombreuses pêcheries de poisson rond, de poisson plat et de langoustines dans la mer du Nord et dans certaines pêcheries similaires des Régions III et IV. Il y a des raisons de croire que les rejets augmentent lorsqu’il s’agit de stocks comportant une proportion importante de juvéniles. Des mesures imposant l’utilisation de dispositifs sélectifs ont permis de réduire les quantités de rejets provenant du chalutage de la crevette dans l’UE.

Dans la Région I, des interdictions de rejets sont imposées dans les pêcheries des îles Féroé, d’Islande et de Norvège depuis les années 1990. Elles s’accompagnent de mesures parallèles qui découragent l’écrémage. Les maillages sélectifs sont largement utilisés dans les pêcheries démersales de la Région I, afin de limiter les captures de juvéniles ou d’autres espèces. Les programmes de réduction des rejets les plus réussis sont ceux développés en étroite collaboration avec l’industrie de la pêche. Pour la pêche au merlan bleu autour des îles Féroé, par exemple, l’utilisation de maillages sélectifs est devenue obligatoire en 2007, afin d’éviter les captures accessoires de lieu noir et de cabillaud. Cette mesure a été développée en collaboration avec l’industrie de la pêche et étayée par des programmes éducatifs et du matériel subventionné. La surveillance suggère que la réduction des captures accessoires a réussi. De plus, les pays OSPAR appliquent des programmes de surveillance destinés à mesurer la proportion de poissons immatures dans les captures. Lorsque cette proportion dépasse une certaine limite, les zones de pêche sont fermées pendant un certain temps, avec application immédiate de la mesure.

Des efforts supplémentaires sont nécessaires afin de réduire les captures accessoires de mammifères marins

Malgré de nombreux efforts pour réduire les captures accessoires des espèces non commerciales, notamment de requins, et de mammifères marins, toutes les mesures ne sont pas efficaces. Il faut faire plus d’efforts pour réduire la mortalité et améliorer les programmes d’observation. Le TAC pour certaines espèces de requin menacées est de zéro dans les eaux de l’UE mais la sensibilisation au problème peut être médiocre et les captures mal déterminées. Certaines espèces qui faisaient auparavant l’objet d’une pêche commerciale et dont les stocks sont maintenant gravement appauvris, telles que le pocheteau gris dans la Région III, sont devenues des captures accessoires de la pêche ciblant des espèces plus abondantes. Dans certains cas, des espèces qui étaient des prises accessoires (telles que le requin bleu des pêcheries pélagiques océaniques) présentent maintenant une valeur commerciale et sont devenues des espèces-cibles, conservées dans la plupart des cas.

On trouve encore régulièrement des marsouins, des dauphins et des phoques emmêlés dans des engins de pêche. Le taux de mortalité de marsouins pris dans les filets maillants et des dauphins pris dans les chaluts pélagiques demeure une source de préoccupation. La question du taux de captures accessoires de cétacés dans les filets dérivants de la pêche au germon a été abordée lors de leur interdiction en 2002 et les filets dérivants ont été ultérieurement interdits dans toutes les eaux de l’UE. Cette démarche a cependant eu pour conséquence le développement du chalutage en bœuf dans certaines zones, technique qui peut également entraîner des captures accessoires. Des recherches sur des mesures d’atténuation des effets sont en cours. L’utilisation des répulsifs acoustiques (pingers) donne des résultats mitigés.

Encadré 8.1 Minimisation des captures accessoires de marsouins

EcoQO pour la mer du Nord: Les captures accessoires annuelles de marsouins devraient être réduites pour correspondre à moins de 1,7% de la meilleure estimation de la population.

Le marsouin est un petit cétacé présent dans les eaux côtières de l’ensemble de la zone OSPAR. Plusieurs types de pêcheries, en particulier celle utilisant des filets emmêlants de fond et filets maillants, sont responsables de captures accessoires de cette espèce. On considère par ailleurs que ces filets sont relativement sélectifs et respectueux de l’environnement et leur usage est en hausse.

On ne dispose pas d’informations fiables sur les quantités de captures accessoires dans la mer du Nord, car la plupart des pêches au filet maillant ne font pas l’objet de programmes de surveillance. Dans la mer du Nord méridionale, jusqu’à la moitié des marsouins échoués ont été tués accidentellement par des engins de pêche, ce qui justifie les préoccupations. Le marsouin est un prédateur supérieur important de l’Atlantique du Nord-Est et on a relevé des déclins historiques dans certaines zones. Il s’agit d’une espèce protégée dans le cadre de la Directive Habitats de l’UE. L’EcoQO OSPAR prévoit de réduire les captures accessoires en mer du Nord pour les ramener à un niveau permettant à la population de reconstituer au moins 80% de la capacité de charge de l’écosystème à long terme pour cette espèce.

Deux difficultés se présentent lorsqu’on tente d’évaluer si l’EcoQO a été atteint. Tout d’abord, on ne comprend pas bien l’état et les corrélations des unités composant la population des marsouins de la mer du Nord; des estimations précises de la population des marsouins et de leur abondance sont nécessaires pour toutes les zones où ils sont présents. Ensuite, il faut mettre en œuvre une surveillance indépendante supplémentaire des captures accessoires. Des programmes d’observation obligatoires, dotés d’une bonne couverture et comportant l’utilisation éventuelle de caméras, sont peut-être le seul moyen de réaliser une surveillance efficace. Les observations devront se poursuivre au-delà de l’introduction de mesures d’atténuation.

Actuellement, les captures de mammifères marins dans la mer du Nord sont toujours accidentelles. La plupart des pêcheurs ne souhaitent pas de telles captures, car elles endommagent les engins et ralentissent les activités de pêche. Cependant, à titre individuel, les pêcheurs capturent rarement des marsouins et peuvent considérer qu’il s’agit là d’un problème environnemental non significatif.

Il n’est pas dans l’intérêt des pêcheurs de donner des informations sur les captures accessoires. L’abattage et le débarquement de marsouins sont interdits dans le cadre de plusieurs juridictions. Des observations étendues suggèrent que les pêcheurs s’efforcent activement de dissimuler les captures accessoires, par exemple en créant des cavités dans les corps pour qu’ils coulent. Le long des côtes des Pays-Bas, des carcasses de marsouins mutilés s’échouent régulièrement sur les rivages, représentant un motif de préoccupation publique et politique.

Les pingers (répulsifs acoustiques) sont considérés comme l’une des mesures préventives les plus prometteuses. Le Règlement 812/2004 de l’UE rend leur utilisation obligatoire pour les navires d’une longueur égale ou supérieure à 12 m utilisant des filets maillants et des filets emmêlants de fond, à l’exclusion de nombreux petits navires. Des pingers sont utilisés, dans le cadre de la législation danoise, dans la pêche au cabillaud pratiquée sur les épaves à l’aide de filets depuis 2000 et sont testés dans d’autres parties de la mer du Nord. Cependant, il reste encore les préoccupations suivantes: leur aspect pratique et leur efficacité à long terme, les impacts négatifs causés par les sons qu’ils émettent et le meilleur mode de mise en vigueur de leur utilisation. La conception de mesures efficaces doit tenir compte des conditions locales et des pratiques de pêche et s’inspirer de l’expertise et de l’expérience des pêcheurs.

Évaluation du système des EcoQO pour la mer du Nord

Réussite de la réduction de la pêche INN dans certaines zones

Des initiatives de la CPANE ont permis aux centres de surveillance des pêches d’améliorer la planification des inspections en mer. Ses listes noires et son système de contrôle par les états de port constituent des outils efficaces de lutte contre la pêche INN. D’autres initiatives de mise en vigueur ont également contribué à cette lutte. Une plus grande coopération entre la Fédération de Russie, l’Islande, la Norvège, l’UE et les États membres de l’UE, facilitée grâce au programme de contrôle et de mise en application de la CPANE, a abouti à une diminution importante de la pêche illicite au cabillaud dans la mer de Barents. On estime que les captures sont passées d’environ 100 000 tonnes en 2005 à environ 15 000 tonnes en 2008. Il est cependant notoire que la pêche INN se poursuit dans d’autres parties de la zone OSPAR. L’on soupçonne que les captures de merlu provenant du stock méridional et de la composante méridionale du stock de maquereau sont largement sous-déclarées.

Encadré 8.2 Pêche illicite, non réglementée et non déclarée du cabillaud dans la mer de Barents

En 2001, le transfert du cabillaud et de l’églefin des navires de pêche aux navires de transport (transbordement), qui fait partie des opérations de pêche russes en mer de Barents (voir la photo), a fait l’objet d’une évaluation conjointe norvégo-russe des risques opérationnels. Elle a conclu que 45% seulement des transbordements déterminés étaient notifiés aux autorités russes de contrôle de la pêche. L’absence, à l’époque, d’accords de contrôle entre la Russie et les pays où le poisson transbordé était généralement débarqué (pays de l’UE essentiellement) laissait une porte grande ouverte à la pêche INN à très grande échelle.

Les autorités norvégiennes et russes de contrôle de la pêche ont réalisé que l’ampleur de la pêche INN en mer de Barents était potentiellement grave et elles sont convenues de travailler conjointement en engageant des poursuites judiciaires dans des cas bien documentés de débarquements de captures non notifiés. Entre 2005 et 2007, la Direction norvégienne des pêches a présenté 53 de ces cas à sa contrepartie russe. Il s’agissait de débarquements, dans des pays de l’UE, de captures de cabillaud et d’églefin s’élevant au total à 20 000 tonnes, qui n’avaient pas été notifiés aux autorités russes afin d’être enregistrés et rapprochés des quotas. Les poursuites en Russie ont conduit à un nombre très important de condamnations entraînant la faillite ou la dissolution de plusieurs sociétés de pêche, et ainsi la mise à quai de 26 navires de pêche et de transport.

La Norvège et la Russie ont convenu, en 2005, d’interdire les transbordements autres que dans des navires battant pavillon soit de Parties contractantes à la CPANE ou de Parties non contractantes coopérantes. Cette démarche a limité les transbordements illicites par les navires battant pavillon de complaisance à un tel point que cette pratique a cessé depuis 2007. Un système de contrôle par l’état du port a été introduit dans le cadre de la CPANE, en étroite coopération avec l’UE. Il permet aux autorités russes de contrôle de la pêche de surveiller de près les débarquements par les navires russes. La mise en œuvre de ce système a contribué de manière significative au déclin de la pêche illicite du cabillaud en mer de Barents.